Sapèque (I) : Arbre à sapèques

L’«arbre à sapèques» (钱树, qian shu) ou «arbre à monnaie» est un objet légendaire chinois dont les feuilles sont remplacées par des pièces de monnaie anciennes.

Selon la légende, Bing Yuan se promenait le long d’un chemin où était tombé un collier de sapèques (方孔钱, fang kong qian). Ne trouvant pas son propriétaire, il accroche le collier fait de pièces à l’arbre le plus proche pour que celui-ci puisse le retrouver. Le premier passant, voyant ce collier sur l’arbre, est persuadé qu’il s’agit d’un arbre portant chance et y suspend à son tour un collier de pièces. Le second fait de même. Ainsi, les gens ont pris l’habitude d’accrocher leurs pièces de monnaie sur cet « arbre divin » espérant qu’il leur apportera la richesse.

L’«arbre à sapèques» (摇钱树, yao qian shu) fait référence, dans sa forme, aux techniques de production des pièces : après la pesée du métal et la fabrication des moules, l’alliage fondu est coulé ; lors du démoulage, il ne reste plus qu’à ébarber les sapèques reliées entre elles en formant une arborescence.

Des arbres en bronze ou en argent dont les branches, dirigées vers les quatre points cardinaux, sont pleines de pièces ont été trouvés dans les sites funéraires de la dynastie des Hans de l’Est, notamment dans les provinces du Sichuan, du Yunnan et du Guizhou. Les archéologues chinois ont nommé ces mobiliers funéraires « arbres à sapèques » ou « arbres à monnaie » puisque les pièces, généralement des wuzhu, étaient accrochées dans les arbres dont les socles en relief représentaient souvent une montagne, une terre fertile où des hommes frappant l’arbre avec un bâton afin de faire tomber les pièces vers des enfants agitant les branches.

Arbre à sapèque, dynastie Han

Pour les contemporains de ces présents, les objets étaient appelés « arbre de l’immortalité » ou « arbre divin ». En effet, l’arbre relie la terre et le ciel. Sa symbolique est donc très proche de la pièce avec sa forme ronde (ciel) et son trou carré (terre) avec l’avantage de pouvoir conduire au ciel. Grâce à lui, l’âme du défunt peut atteindre la terre des Immortels. Cet arbre est donc la matérialisation du désir d’allier la vie éternelle avec sa richesse. D’ailleurs, les Immortels, cigales, paons, phénix[1] qui ornent les décorations invitent à vivre plus de mille ans.

L’arbre qui conduit au ciel est donc un « arbre divin » parce qu’il concentre en lui et l’aspiration à la vie éternelle et la recherche des richesses. Aujourd’hui, l’arbre à sapèques est un porte-bonheur parmi d’autres pour amener la fortune à son propriétaire. Il semble avoir perdu son message divin tant le riche n’aspire pas, comme l’« oiseau de cinabre », à détenir les cinq vertus cardinales qui sont la bonne conduite, le respect des règles, la bienveillance, la droiture et la sincérité. D’ailleurs, le phénix pourrait-il être riche dans la Chine contemporaine ?


[1] Le phénix rouge fait partie des « Quatre animaux sacrés » de la mythologie chinoise avec le dragon vert, le tigre blanc et la tortue noire.

Publié par Pascal Rigaud

Enseignant SES

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